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Désignation des chefs coutumiers en Afrique : Quelles leçons tirer pour enrichir notre démocratie ?

moaga uneEn Afrique, avant le pouvoir démocratique ou l’Etat moderne, le mode de gouvernance était basé sur la monarchie. Tout comme le vote dans la démocratie, il y avait un mode de désignation des chefs, rois et empereurs. Entre ces deux modes de désignation des dirigeants, quelles sont les ressemblances et les dissemblances ?

Avant la colonisation, dans certaines civilisations en Afrique, le culte des idoles et des anciens, morts ou vivants, avait une importance particulière dans la société. Les classes d’âge donnaient les repères et l’âge donnait la légitimité. On choisissait donc les dirigeants en fonction de l’âge et selon le principe que le plus âgé est celui qui se rapproche le plus des anciens. Dans certaines communautés, le pouvoir se transmettait de frère en frère, par ordre de naissance. Pour d’autre encore, cela se faisait de père en fils. Et comme mode de désignation, c’était une assemblée d’adultes qui formalisait le choix. Cette assemblée pouvait décider de faire régner un frère plus jeune si l’aîné, pour une raison ou une autre (maladie, débilité, incapacité évidente), n’était pas en mesure d’assumer la charge. Le choix des dirigeants était assez important dans ces sociétés pour que tout le monde y participe. Il était réservé à une élite gérontocratique minutieusement sélectionnée. N’importe quelle personne âgée ne pouvait accéder au pouvoir. Il devait appartenir à l’élite qui tient sa légitimité soit de la conquête, soit de l’appartenance à la descendance des dirigeants. Le pouvoir restait dans la même famille et le même clan. Toute volonté de changement provoquait une crise.

Outre ce mode de désignation, ces royaumes africains avaient une remarquable cohésion sociale et une stabilité politique exceptionnelle, grâce à un mode de gouvernance participatif de la base au sommet. Dans ces royaumes, les dirigeants, depuis le village jusqu’au niveau central n’agissaient pas seuls. À titre d’exemple, le chef du village était le plus âgé de la bourgade. Dépositaire d’une expérience, d’une sagesse que lui conférait son âge, il était assisté des chefs de famille qui l’orientaient, ce qui constituait une garantie de la communauté contre tout abus. Les villages regroupés formaient une province administrée par un représentant du roi ou l’empereur qui agissait dans le sens du respect des coutumes et traditions. Le pouvoir central gouvernait en prenant en compte les avis et recommandations des gouverneurs de province. C’est dire que l’individu était présent, d’une manière ou d’une autre, mais à travers des mécanismes hérités de traditions cultuelles longuement éprouvées.

De nos jours, certaines de ces pratiques sont toujours d’actualité dans plusieurs communautés mais ne sont plus perceptibles à cause de la démocratie. Nous constatons que ces notabilités coutumières font l’objet de sollicitations pour la résolution de plusieurs crises au pays des hommes intègres. Pour cela, d’aucuns pensent que trouver un cadre formel pour profiter de ce système empreint de nos réalités culturelles serait profitable à notre démocratie. Pour le professeur Albert Ouédraogo, « si l’on ne veut pas pervertir la démocratie, il est urgent que soit définie la place des garants des valeurs traditionnelles dans la société en pleine mutation qu’est la nôtre. Il est souhaitable que les autorités coutumières et les chefs traditionnels aient un cadre officiel d’expression qui les protège des attitudes partisanes ».

A notre avis, plusieurs aspects des coutumes tiennent plus compte de nos réalités culturelles et peuvent être pris en compte dans notre système démocratique pour une bonne gestion des pouvoirs.

Saâhar-Iyaon Christian Somé Békuoné